Cheikhou, comment passez-vous vos vacances en cette période de ramadan ?
Je suis content de pouvoir passer plus d'un mois avec mes parents. Je profite du mois béni du ramadan pour présenter mes meilleurs vœux à toute la Oumma musulmane. Ça fait un bon moment que je n'ai pas passé ce mois de ramadan en famille. Ça a toujours été difficile pour moi de le passer en Europe avec les entraînements. Je suis en train de passer mes meilleures vacances. Après, on va rentrer au club et reprendre le travail.
Vous en profitez pour organiser un tournoi de football...
Effectivement, j'organise un tournoi à Khar Yalla. La compétition regroupe toutes les équipes de Navétane du quartier. C'est une façon pour moi de prouver à la population que je n'oublie personne. Ce quartier m'a tout donné. J'y suis né, j'y ai grandi et c'est la ou j'ai commencé à taper dans le ballon. C'est vraiment une fierté de partager avec mes amis et toute la population de Khar Yaala.
Quelles seront les récompenses qui seront décernées ?
Quel que soit le résultat final, toutes les équipes auront chacune une enveloppe financière, des ballons et des polos. Cela va aider les équipes à bien préparer leur championnat populaire, communément appelé «Navétane». Le vainqueur aura un trophée et une enveloppe financière. C'est la seule diffèrence.
Quel bilan tirez-vous de votre dernière saison à West Ham ?
Ce qu'on a réalisé n'est pas mal, même si ça aurait pu être meilleur que ça. Je connais mes qualités et je peux mieux faire. L'essentiel, c'est de continuer à travailler dur afin de rééditer le coup de l'année dernière. Mon papa me dit souvent : «Cheikhou, tu n'as rien fait». À travers ce message, je comprends ce qu'il veut me dire. À moi de continuer à travailler. Là, je m'entraîne petit à petit en organisant des matchs d'entraînement avec les amis du quartier. La saison prochaine sera décisive pour nous. On aura beaucoup de matchs: le championnat, l'Europa League, les matchs de coupe, sans oublier la Coupe d'Afrique et les qualifications pour la Coupe du monde 2018. Pour cela, il faut se préparer mentalement.
N'est-il pas frustrant de ne pas jouer la Ligue des champions, vu le parcours que vous avez réalisé avec West Ham ?
C'est vrai que c'est frustrant. Mais nous ne devons nous en prendre qu'a nous-mêmes. Un n'a pas joue tous nos matchs comme il se devait. Quand on joue contre les grosses cylindrées, la concentration était de mise parce qu'on ne voulait pas perdre. Mais s'il s'agit des équipes qui avaient le même niveau que nous ou qui étaient en bas de tableau, on les sous-estimait. Ça été une grande leçon pour nous. Dans le foot, il ne faut pas prendre à la légère les adversaires quel que soit leur statut. Si on ne s'était pas vu trop beau, on serait qualifie pour la Ligue des champions. Nous devons changer notre mentalité. Heureusement que nous avons un coach, Slaven Bilic, qui travaille sur ça. J'espère qu'on ne vivra plus le même scenario.
Quel objectif vous êtes vous fixé ?
C'est essayer d'amener West Ham plus haut si j'y reste. L'attente sera grande avec notre nouveau stade : le stade Olympique qui est plus grand et plus magnifique. On sera attendu. On se battra pour faire mieux que l'année passée. Et je passe qu'avec mes qualités, je pourrai aider mon équipe à viser plus haut.
Et si on parlait de la situation de votre coéquipier, Diafra Sakho ?
Je pense que Diafra a manqué de chance. N'oublions pas qu'il est resté blessé pendant quatre mois. C'était alors difficile d'atteindre son objectif de marquer 20 buts dans la saison, vu son long temps d'indisponibilité. Sa blessure est survenue au mauvais moment. Heureusement qu'il n'a pas craque au début. Mais, cette blessure lui a fait mal au cœur et cela l'a freine dans son élan.
Lui conseillerez-vous de partir ?
Non, pas du tout. Je lui dis tout le temps de rester au club. Le coach l'aime, il est apprécie par les joueurs. Dimitri Payet et moi-même nous l'aimons beaucoup. Perdre Diafra Sakho, c'est perdre un grand attaquant. Et ça, les dirigeants de West Ham le savent.
Quelle appréciation faites-vous de Dimitri Payet ?
Il ne faut pas se leurrer, tout ce que Payet a aujourd'hui, il l'a mérité. Quand il est arrivé à West Ham en provenance de l'Olympique de Marseille, il a eu du mal à tenir physiquement au début. Mais pendant les matchs amicaux, il a mis tout le monde d'accord sur son potentiel. Je me rappelle son premier match amical, il met deux buts et une passe décisive. Et comme dit le coach, Payet est phénoménal. C'est un vrai magicien. C'est un joueur qui est aussi essentiel au collectif de l'équipe. Il est respectueux. S'il continue comme ça, il est clair que West Ham va le perdre.
Suffisant pour que chantiez "we've got Payet" pour lui ?
Je suis inséparable de Payet et Diafra. Dans les vestiaires et au Restaurant, on se met côte-à-côte. Ce jour la, on était en fête. Il a gagné tous les trophées du club. C'était une façon pour moi de le rendre heureux tout en le chambrant. Quand je chantais, il a beaucoup rigolé. C'était l'objectif. Un est une famille. Qu'on vienne de la France, de l'Angleterre, du Burkina Faso, on reste soudé. Quand on vous montre du respect, il faut rendre la pièce de la monnaie. C'est pourquoi ce jour-la je me suis lâche. Il y a même certains qui ont dit que j'étais bourré (éclats de rires). Or, je ne connais même pas l'alcool.
Les techniciens pensent que cette année, vous avez réussi votre meilleure saison avec West Ham ?
C'est ma meilleure saison depuis que je suis footballeur professionnel. Je n'ai pas gagné plusieurs titres collectifs, mais j'ai gagné plusieurs titres individuels. A West Ham, j'ai progressé dans tous les domaines grâce à mon entourage. Les gens ne savent pas le sacrifice que nous faisons en tant que footballeurs. J'ai marqué 5 buts et j'en ai raté une douzaine (éclats de rires). Vraiment j'ai eu la confiance du coach et de mes coéquipiers. J'ai failli partir à Tottenham. C'est avec les larmes aux yeux que j'ai dit au coach Slaven Bilic que je voulais partir chez les Spurs. Il m'a convaincu de rester. Lors d'une discussion, il m'a promis de rester et m'a convaincu que j'allais progresser et que des équipes plus huppées que Tottenham viendront vers moi. Aujourd'hui, je me suis rendu compte qu'il m'aide a progresser. Je ne me complique pas la vie. Je ne joue pas comme Sadio Mané qui est un adepte des dribbles et des beaux gestes. Moi je m'occupe juste de ma tâche de milieu récupérateur.
Ça vous dit quoi l'équipe nationale ?
A chaque fois qu'on travaille en sélection, je pense tout le temps au passé. Mais, depuis quelque temps, les habitudes ont changé. L'arrivée d'Aliou Cissé a beaucoup changé nos mentalités. On est devenu plus responsable. Un n'est plus ces gamins laissés à eux-mêmes. Nous évoluons dans un cadre professionnel avec une Fédération de qualité. Seule l'équipe compte, pas les personnes. Le coach est parvenu à nous inculquer ça dans la tête. Tous les joueurs ont adhéré et nous sommes tombés d'accord. L'équipe commence à grandir. Cela nous a permis de connaître nos objectifs. C'est-à-dire aller au Gabon et franchir obligatoirement le cap du premier tour. Le Sénégal le mérite. Pour y arriver, on fera de chaque match une finale. Le coach a déjà fini de mettre ça dans nos têtes. Que ce soit un match amical, un match d'entraînement ou officiel, l'objectif reste le même : la gagne. En équipe nationale, la place de titulaire n'appartient à personne. Ceux qui sont sur le banc sont aussi importants que ceux qui sont sur le terrain. Il y a un équilibre et en tant que footballeurs, nous sommes fatigués et en avons marre d'aller à la CAN et de rentrer bredouilles, au premier tour.
Êtes-vous satisfait du jeu que vous produisez ?
Franchement, nous sommes contents quand nous gagnons nos matchs. L'essentiel, c'est qu'on retrouve de l'équilibre dans le groupe. Si vous regardez nos dernières sorties, même si ce n'est pas encore parfait, vous vous rendrez compte que l'équipe monte en puissance et fait quelque chose de positif. Nous ne prenons pas non plus beaucoup de buts. Un est en train de grandir. Depuis quelques mois, tout le monde se rend compte que les dirigeants de la Fédération, le coach et les joueurs ont changé beaucoup de choses. Nous avons une bonne mentalité, la grinta et nous avons envie de gagner ensemble. J'espère que si on continue à mettre en avant tout le sérieux qu'il faut on pourra atteindre nos objectifs.
Justement, quel objectif vous vous fixez pour la prochaine Coupe d'Afrique ?
Il nous faut une bonne préparation pour réussir la CAN-2017. Mentalement, je suis persuadé que le sélectionneur va insister dessus parce que, dans des compétitions du genre, quand on est bon dans la tête, physiquement, on n'a pas de problème majeur. Arrivé à la CAN, on ne se verra pas trop beau. On ne se dira pas qu'on a Sadio Mané notre meilleur joueur, ou Idrissa Gana Gueye l'un des meilleurs récupérateurs du championnat anglais. Non, ce n'est pas ça. On va se battre pour montrer qu'on a envie de gagner cette Coupe d'Afrique. Même s'il faut mourir sur le terrain pour la patrie, on le fera. Même s'il faut mettre la tête dans le sol, on n'hésitera pas.
Qu'est-ce qui n'avait pas marché à la CAN-2015 ?
On a bien commencé la compétition en battant le Ghana. Je pense que c'est cette victoire-là qui nous a éliminés. Après la victoire, tout le monde se voyait beau. Et on pensait qu'on y était déjà arrivé. Je connais la mentalité des Sénégalais. A chaque fois qu'on pense que c'est facile, on passe à côté. En son temps, il nous arrivait de ne pas dormir très tôt parce que dans notre tête le match du lendemain devrait être facile. En 2015, c'est le sérieux qui nous a manqué et le respect de l'adversaire. Maintenant, on a compris que tant que ce n'est pas fait, on n'est pas arrivé.
Le tirage au sort de la Coupe du monde 2018 est-il facile pour le Sénégal?
Ce n'est pas mal comme tirage. L'Afrique du Sud est une très bonne équipe qu'il ne faut pas négliger. Le Burkina est finaliste de la CAN-2013 tandis que le Cap-Vert a récemment éliminé l'Égypte et le Cameroun. Nous avons des adversaires qu'il ne faut pas minimiser. Nous aurons des matchs piège. A nous de prendre les rencontres les unes après les autres. Nous savons que rien n'est facile et rien ne nous sera donné. Tout dépend de nous, sachant que nous avons la Coupe du monde dans notre viseur.
Êtes-vous d'avis que le Sénégal déçoit à chaque fois qu'il est favori de son groupe ?
En tout cas, moi je ne me focalise pas sur les noms des équipes adverses. Nous étions favoris de notre poule pendant les éliminatoires de la CAN-2017. Le coach nous dit souvent que le Sénégal est favori mais nous n'avons pas le droit de lâcher. La preuve, à deux semaines du match contre le Burundi, on a démarré un stage de préparation. On s'est entraîné comme des malades. On est resté sérieux en sacrifiant nos vacances. On est resté une semaine au Rwanda avec des entraînements de fou comme si on préparait une finale de Coupe du monde. C'est dans cette mentalité qu'on doit continuer. On a tous conscience que l'équipe nationale est plus importante que nos clubs respectifs.
Le Sénégal va-t-il se qualifier à la Coupe du monde 2018 ?
On ne pense pas le contraire. Sincèrement, on a envie d'aller en Russie pour participer à cette Coupe du monde. Un n'a pas envie de rester devant nos postes téléviseurs pour suivre la compétition. Si on a envie d'y aller, il faut sérieusement préparer les matchs. Déjà au mois de septembre, on a un match face a la Namibie. C'est vrai que c'est pour finir en apothéose devant notre public, mais on profitera de l'occasion pour parler des prochaines échéances. Ça sera une rencontre pour la remobilisation des troupes. En tout cas, le match Sénégal-Cap vert est à gagner. On ne fera pas que parler mais plutôt poser des actes.
Parlons de Sadio Mané qui vient de signer à Liverpool...
(Il coupe). C'est une fierté pour nous parce que partout où on va, les gens disent qu'il n'y a aucun Sénégalais dans un grand club. Au-delà du Sénégal, c'est une fierté pour toute l'Afrique. Personnellement, je sais que Sadio peut réussir à Liverpool. J'ai joué contre les Reds et j'ai aussi joué contre tous les grands footballeurs du championnat anglais, mais croyez-moi c'est le meilleur Africain de la Premier League. Avec Gana Gueye, on lui dit souvent que s'il ne gagne pas le Ballon d'Or africain, il n'a qu'à s'en prendre à lui-même. Parce qu'il a tout le temps qu'il faut pour y arriver. Étant dans un grand club,je sais que Sadio n'a pas peur. Il est avec un coach qui l'aime bien. Ensemble. ils peuvent gagner beaucoup de choses. C'est un garçon que j'apprécie énormément. Je suis sûr qu'il travaille beaucoup. Il suffit de jeter un coup d'œil sur les joueurs qui ont travaillé sous les ordres de Jürgen Klopp pour se rendre compte que Sadio aura tous les atouts pour réussir là où d'autres figures ont échoué.
Le quotidien #Stades : Une du jeudi 30 juin 2016... #Senegal #Team221 #kebetu #EURO2016 #POR #POL pic.twitter.com/I1zG5oEO5I— SUNU FOOT (@snfoottk) 29 juin 2016
STADES
Réagissez Google+ Facebook