Digne d'une saga: le Franco-Algérien Andy Delort, un temps accusé d'opportunisme par les supporters les plus chauvins des Fennecs, fait finalement le bonheur de la sélection algérienne, après avoir bénéficié d'une naturalisation expresse et de l'exclusion d'un joueur dans la liste pour la CAN.
Quoi de mieux qu'un but dès sa première sélection pour se faire définitivement adopter ? Trois jours après avoir appris sa convocation chez les Verts pour remplacer le milieu Haris Belkebla, le natif de Sète (27 ans) a offert la victoire contre le Mali (3-2), lors du dernier match de préparation.
Fousseni Diawara, entraîneur-adjoint du Mali, a salué l'implication de son adversaire, et ancien coéquipier en club à Ajaccio puis Tours entre 2010 et 2014, sous ses nouvelles couleurs.
"J'ai joué cinq ans avec lui. Je lui ai parlé, il va se battre, il va mourir sur le terrain pour l'Algérie. Je le connais, je l'ai vu entrer déterminé. C'est un guerrier ce joueur", a-t-il confié auprès de France Football. Comme pour déminer toute défiance à son encontre.
Car avant de connaître les joies d'une première sélection, Delort, qui a des racines algériennes par l'intermédiaire de sa mère, avait médiatisé sa demande de nationalité... quelques semaines seulement avant le début de la compétition continentale.
Un timing, tout sauf anodin, qui a attisé les accusations d'opportunisme. "J'ai fait toutes les démarches tout seul, cela fait un moment que je ne pense qu'à cela. J'ai vraiment envie de mouiller le maillot", s'était-il défendu sur RMC.
- "Petit pays dans la poche" -
Interrogé sur l'appel du pied insistant de l'ancien international français des moins de 20 ans, le sélectionneur algérien Djamel Belmadi, lui-même binational, a semblé prudent au départ en mai dernier.
"Il a été très actif sur sa communication et pour récupérer ses papiers. Je ne me rappelle pas, pour des renouvellements de passeports ou autre, avoir eu autant de privilèges", avait-il ironisé, sur le plateau de beIN Sports, avant de simplement dire qu'il était "sélectionnable".
Pourquoi tant de précautions ? Une interview datant de 2017 et exhumée sur les réseaux sociaux, où Delort avait déclaré qu'il n'avait pas d'autre pays que la France pour prétendre jouer une compétition, a froissé l'orgueil d'une partie des supporters des Verts.
A la question, "peut-il jouer pour d'autres pays que la France", le joueur de culture gitane avait répondu : "La Roumanie. Non, je rigole, ce n'est pas vrai. Je n'ai rien, malheureusement. Il y en a qui ont la chance d'avoir un petit pays dans la poche. Moi, non."
"Quand je suis allé au Maroc pour le Marrakech du Rire, j'ai croisé Hervé Renard (sélectionneur marocain). Pour rigoler, il me dit : +Tu n'as pas un cousin ou un oncle Marocain toi ?+ Je commence à me marrer et il ajoute : +Même un voisin, ça peut passer !+."
- Affaire Belkebla -
L'incroyable affaire Haris Belkebla, exclu de la sélection pour avoir été vu sur internet exhibant son postérieur derrière un de ses coéquipiers qui participait à un jeu vidéo en réseau, et son intégration réussie ont finalement fait tout oublier.
"C'est une fierté pour moi d'être là, j'ai dû mal à réaliser, je tremblais quand j'ai reçu l'appel téléphonique du coach", avait savouré l'attaquant de Montpellier au micro de la Fédération algérienne, juste après sa convocation.
Nés dans un autre pays que celui de leur sélection, passés même pour certains en équipes de jeunes d'une autre nation avant de finalement opter pour la nationalité sportive du pays de leurs parents, les joueurs binationaux seront nombreux à animer la CAN 2019.
De "l'Espagnol" Keita Baldé (Sénégal) au "Néerlandais" Hakim Ziyech (Maroc), en passant par "l'Allemand" Leon Balogun (Nigeria), le cas Delort est loin d'être isolé.
Sur les 552 joueurs évoluant dans les 24 sélections en lice, 120 sont nés en Europe, dont 89 en France.
Les raisons de ce phénomène ? Le changement du règlement de la Fifa en 2009, qui donne la possibilité à un joueur de changer de sélection nationale après 21 ans (à condition de n'avoir auparavant jamais évolué en sélection A).
Suffisant pour permettre à Andy Delort, Riyad Mahrez et les douze autres "Français" de l'Algérie d'offrir à leur sélection la deuxième CAN de son histoire ?
AFP
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